BD et FLE – Le piano oriental (Partie 2)
2ème étape du voyage : l’apprentissage de la lecture
L’écrit est omniprésent dans cette bande-dessinée. Rien d’étonnant pour ce média qui combine souvent image et texte mais l’écrit est pris ici comme objet même d’une partie de l’histoire, sous différents aspects.
Tout commence dès la couverture : sur l’intérieur des pages de couverture, l’écriture latine et arabe sont mêlées.
Ensuite, tout au long de la BD, le texte est écrit dans 2 langues principalement, arabe et français mais aussi parfois en anglais, et donc dans 2 alphabets. Cela concerne les bulles et onomatopées mais aussi les écrits urbains qui sont dessinés.
C’est un régal pour les yeux et cela participe grandement à recréer pour le lecteur l’environnement bilingue qui était évoqué dans la première partie de cette série de billets autour du Piano oriental.
Étant donné que je travaille avec des adultes qui parfois n’ont jamais appris à lire ou parfois ont appris à lire dans un autre alphabet, je m’intéresse à la façon dont les auteur.ice.s (de romans ou de BD) traitent la question de l’apprentissage de la lecture, à plus forte raison dans cette BD qui prend place dans un univers bilingue.
L’autrice propose un témoignage que je trouve intéressant et qui peut servir de support à une réflexion sur les stratégies d’apprentissage de la lecture-écriture par les adultes.
Un passage est spécifiquement consacré à l’apprentissage de la lecture :
Ma mère avait l’habitude de nous lire une histoire tous les soirs (…) Je me souviens que je suivais avec fascination le chemin de son doigt (…) qui donnait vie aux mots sur les pages. (…)
Plus tard j’appris à lire. Je me souviens que sur le chemin de l’école, j’essayais de déchiffrer les enseignes des magasins, les affiches publicitaires, les slogans politiques sur les murs, enfin, tout ce qui me passait sous les yeux. Mais comme je lisais trop lentement, j’avais mis au point une technique, je photographiais les mots dans ma tête et prenais mon temps pour les déchiffrer.
Le mot retentissait un peu plus tard sur le trajet comme un petit feu d’artifice.
Je savais lire ! C’était le bonheur…
Et le temps des grands questionnements…
Je me souviens d’un graffiti en français sur le chemin de l’école, derrière un conteneur près du passage du musée “Mieux vaut mourir debout que vivre à genoux”. Avec la langue m’arrivaient les idées.
Le + pour le FLE : Le passage sur la lecture en famille permet d’interroger les cultures familiales du rapport à l’écrit. Par ailleurs, l’illustration permet de comprendre quelle est l’histoire lue par la mère et donc de s’appuyer sur la littérature partagée.
La planche qui raconte les souvenirs sur le chemin de l’école est un support intéressant pour débloquer la parole sur les stratégies d’apprentissage de la lecture. Construite comme une infographie (vous savez, celles avec un chemin et des infos sur des panneaux). Le texte est sobre, facile à lire. On peut, par exemple, photocopier cette page et proposer d’ajouter dans les panneaux préalablement “vidés” de leur texte ce que chacun.e lit sur le chemin entre chez soi et le lieu de la formation.
Ensuite, la page suivante propose une image du personnage les yeux fermés, on peut réaliser une carte mentale autour de cette image et écrire les trucs et astuces du groupe pour mémoriser et apprendre à lire.
Enfin, la dernière planche liée à l’extrait a pour fond une carte de la ville du personnage et des extraits lus dans la ville. Il est possible de demander à chacun.e de relever des écrits dans la ville et de les inscrire ensuite sur un plan de la ville afin de les géolocaliser (version papier ou sur une carte OpenStreetMap créée pour l’occasion).
Bonne découverte de ce passage et si vous testez les activités proposées, n’hésitez pas à venir nous raconter 🙂
(Découverte grâce au graffiti évoqué, Dolores Ibárruri)